Qu’est-ce que c’est le marché du carbone ?

Cédric Morel & Hamza El Matoni
(étudiants Master SET spécialité Système Terre - Changements Globaux)

Le marché du carbone est un système d’échange de droits d’émissions de gaz à effet de serre (GES), crédits carbone et quotas carbone. C’est un outil politisé utilisé par une entité publique, Etat ou organisme à rayonnement mondial qui fixe aux émetteurs de gaz à effet de serre un plafond d’émission plus bas que leur niveau d’émission actuel et leur distribue des quotas d’émission correspondant à ce plafond.
L’objectif principal de ce marché du carbone correspond à une réduction des émissions des gaz à effet de serre des plus gros pollueurs mondiaux en accord cohérent avec les engagements pris par ces pays lors de traités internationaux. Par exemple le protocole de Kyoto signé en 2005 engage l’Union Européenne à réduire ces émissions de GES (Gaz à Effet de Serre) de 8% en 2012. 
Chaque état qui s’est donc engagé dans un traité se voit en fait recevoir un quota carbone qu’il ne doit pas dépasser. Ce quota symbolise en quelque sorte la quantité de gaz à effet de serre que le pays est « autorisé » à larguer dans l’atmosphère. 
L’unité sur laquelle repose le marché du carbone est le quota carbone ou crédit carbone. Un quota carbone correspond à une tonne de gaz à effet de serre émise. Plusieurs gaz à effet de serre sont concernés dans ce marché du carbone : le dioxyde de carbone (CO2), le méthane (CH4), les oxydes d’azote (NOx), certains hydrocarbures et composés du soufre.
Afin de respecter ses engagements, l’Etat ou l’entreprise concerné dispose de deux possibilités. Soit il investit dans des technologies qui permettront dans un futur proche de réduire les émissions, soit si il estime qu’il est coûteux d’investir et que cette réduction peut impacter son économie (c’est le cas des pays émergents comme la Chine), elle peut alors acheter des quotas de carbone supplémentaires l’autorisant à « polluer plus ». Cela se fait auprès des bourses du carbone (Bluenext en France, ECX à Amsterdam, EEX en Allemagne) qui fixent les prix des quotas carbones dont le niveau des prix est géré par la loi de l’offre et de la demande. Si l’on assimile le marché du carbone à la Bourse, les quotas carbone correspondent aux actions boursières. 
Si les coûts de réduction des émissions sont plus faibles que le prix du marché, l’émetteur concerné peut alors devenir vendeur de quotas sur le marché car il est dit bénéficiaire en quotas carbone (Cf. Figure 1).


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

En effet dans un contexte économique ultra mondialiste (mais non sans risque), les compagnies internationales faisant partie des plus gros pollueurs mondiaux sont tentées de délocaliser leurs entreprises dans des pays moins rigoureux sur le plan environnemental ou n’ayant ratifié aucun traité de réduction des émissions de GES ; réalisant alors un « dumping » environnemental. Ce phénomène est appelé « fuite du carbone ».
Afin de contrer ce phénomène qui pourrait s’accroître, la commission européenne avait déjà envisagé d’instaurer une taxe à l’importation pour les produits intensifs en GES pour éviter la délocalisation. Il faut noter que la création d’une telle taxe est contraire aux règles de commerce dictées par l’OMC qui interdit de protéger son industrie nationale (ce qui est par ailleurs autorisé dans certains pays hors UE). 
Les pays exportant des produits intensifs en GES étant majoritairement des pays peu développés ou en développement, cette taxe à l’importation semble injuste. Une alternative serait alors de redistribuer les recettes de la taxe afin de permettre l’investissement dans des technologies plus propres dans les pays en développement.
D’autre part il existe une fraude facile à réaliser qui a coûté déjà entre dix et vingt milliards aux pays européens. Dans son livre Carbone Connexion, Aline Robert explique que des escrocs anglais ont achetés des quotas carbones pour les revendre aux pays dont la TVA était plus importante sans reverser la plus-value au pays acheteur.
Quelles sont donc les perspectives du marché du carbone et quelle est son efficacité ?
Largement décrié, il peine à remplir les attentes qui ont motivé sa mise en place. D’autre part, la crise de 2008 et ses répercussions ont réduit l’activité des différentes industries et les émissions de GES. Les entreprises se sont donc retrouvées avec un surplus de quotas. 
Même si le succès n’est pas aussi franc qu’espéré, une solution serait de faire du blackloading c’est à dire tout simplement retirer du marché un nombre défini de quotas afin que les entreprises se concentrent davantage sur la réduction des émissions via des technologies plus propres plutôt que de faire du profit en jouant sur la côte des quotas carbones.
La question du marché du carbone et surtout du changement climatique est avant tout une question politique. Il faut donc que tous les pays et surtout les plus gros pollueurs soient au diapason. Les Etats-Unis n’ont signé aucun traité parce qu’ils doivent faire face au lobbying des entreprises minières et pétrolières. C’est un exemple de difficulté du marché du carbone.