Où en est-on dans les accords internationaux ? Que s’est-il passé depuis le protocole de Kyoto ?

Anne-Sophie Tabau (Maitre de conference : Université Paris XIII, chercheur associé au CERIC)

 

La Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de 1992 poursuit l’objectif ultime « de stabiliser (...) les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute perturbation anthropique dangereuse du système climatique (...) » (Article 2) et formule plusieurs principes organisant la coopération internationale pour y parvenir, dont celui des responsabilités communes mais différenciées. Ces énoncés généraux ont ensuite été précisés par le Protocole de Kyoto de 1997.

Ce traité fixe aux pays visés à l’Annexe I, c’est-à-dire aux pays industrialisés, un objectif collectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 5,2% par rapport à 1990, à atteindre en 2012. Mobilisant à la fois « la carotte et le bâton », le Protocole de Kyoto a pu être présenté comme particulièrement sophistiqué. Il assortit, en effet, cet objectif de plusieurs mécanismes dits « de flexibilité » visant à en faciliter l’atteinte à moindre coût par le jeu du marché, mais aussi d’un rigoureux dispositif de contrôle du respect des engagements. Toutefois, suite à la décision américaine de ne pas ratifier cet accord, estimé inéquitable, il devenait clair que l’objectif de la première période d’engagement, déjà peu ambitieux au regard des préconisations du Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC), ne serait pas atteint, tandis qu’aucun engagement post-2012 n’était encore fixé. Par conséquent, les discussions sur la deuxième période d’engagement débutèrent dès 2005, lors de la première Réunion des Parties suivant l’entrée en vigueur du Protocole. 

Face à la croissance des émissions des pays en développement, il apparut rapidement que le renforcement des ambitions au titre du Protocole de Kyoto supposait d’étendre le champ d’application de l’Annexe I. Néanmoins, une telle option ne correspondait pas à la lecture que les pays en développement, en particulier les pays émergents, avaient du principe des responsabilités communes mais différenciées. C’est pourquoi, en 2007, deux enceintes de négociations furent établies, l’une réunissant les Parties à la Convention (le Groupe de travail spécial sur l’action concertée à long terme) et l’autre ouverte aux seuls membres du Protocole de Kyoto (Groupe de travail spécial sur les nouveaux engagements pour les Parties visées à l’Annexe I au titre du Protocole de Kyoto). Le Plan d’action de Bali fixa également les sujets à aborder. Il était nécessaire de mettre en place une « vision partagée sur la coopération à long-terme » permettant d’atteindre l’objectif ultime de la Convention. Au-delà de l’atténuation des émissions de gaz à effet de serre, il convenait de mettre l’accent sur l’adaptation aux effets des changements climatiques. Enfin, deux moyens principaux furent identifiés pour favoriser à la fois l’atténuation et l’adaptation : d’une part, le développement et le transfert technologique, d’autre part, le financement. 

Ce processus de négociation devait s’achever en 2009, afin d’éviter un vide juridique entre la première et la deuxième période d’engagement du Protocole de Kyoto, compte tenu du délai nécessaire pour la ratification d’un amendement. Or, l’ « Accord de Copenhague », élaboré in extremis par un groupe restreint de pays et adopté, parmi d’autres décisions, l’année suivante par la Conférence des Parties dans les « Accords de Cancun », établit seulement des objectifs fixés volontairement par chaque Partie et dont la somme reste très insuffisante pour éviter que la température globale ne s’élève au delà de 2°C, une trajectoire pourtant décidée à Copenhague et confirmée à Cancun. Si bien que, lors de la conférence de Durban en 2011, les Parties décidèrent d’instaurer une nouvelle enceinte de négociations, le Groupe de travail sur la plateforme de Durban pour une action renforcée, dont le mandat est d’élaborer d’ici 2015 un accord inclusif et ambitieux tout en mettant en place des mesures avant l’entrée en vigueur de cet accord en 2020. L’ouverture des négociations dans cette nouvelle enceinte conduisit à la clôture, lors du sommet de Doha en 2012, du mandat des deux autres groupes de travail, bien que de nombreuses questions n’aient pu faire l’objet d’un consensus. Le résultat le plus marquant a été la reconduction du Protocole de Kyoto, dont il convient néanmoins de nuancer la portée étant donné le faible nombre de Parties s’étant engagées à ce titre. Par conséquent, l’avenir du régime international du climat dépendra de l’issue des négociations conduites par le Groupe de travail sur la plateforme de Durban pour une action renforcée, dont les travaux en 2013 ont donné lieu à un esprit d’ouverture et à des discussions constructives. L’enjeu de la prochaine Conférence des Parties, qui se tiendra à Varsovie en novembre 2013, est donc de formaliser ce processus de manière à ce qu’un premier texte soit débattu en 2014 et adopté en 2015.