Est-ce que la biodiversité terrestre de la Méditerranée est particulièrement riche et exceptionnelle ? Est-ce que cette biodiversité est menacée par les changements globaux ?

Thierry Gauquelin (Professeur), Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie marine et continentale (IMBE)

Oui, la région méditerranéenne est un des hauts-lieux de la biodiversité de la planète, tant par la richesse des communautés végétales et animales terrestres et marines que par son niveau élevé d’endémisme [1] . Le Bassin méditerranéen est ainsi l’un des 34 points chauds (hot spots) de biodiversité identifiés au niveau du globe. On y trouve notamment 10% de l’ensemble des plantes vasculaires (les fougères, les résineux et les plantes à fleur) du globe sur un territoire de seulement 1,6% de la surface terrestre. Plus impressionnant, parmi ces 25000 espèces environ (on ne le connaît sans doute pas encore toutes) 50% sont effectivement des espèces endémiques, ce qui confère à cette région une responsabilité particulière en terme de protection de l’environnement. A titre d’exemple, la région méditerranéenne abrite 290 espèces d’arbres, alors qu’elles ne sont que 135 pour tout le Nord de l’Europe. Parmi celles-ci, de nombreuses espèces endémiques, les sapins méditerranéens (la Sapin du Maroc n’est pas le même que celui d’Andalousie ou encore celui de Grèce !), le Thuya de Berberie, le Genévrier thurifère (photos) … et bien d’autres.

Les changements globaux sont malheureusement en passe de profondément modifier cette biodiversité. D’une part, les pressions anthropiques (c’est à dire liées à l’Homme) exercent des impacts multiples et pour la plupart néfastes sur les habitats caractéristiques de la Méditerranée et, in fine, sur la diversité des communautés animales, végétales et microbiennes. Cela est particulièrement vrai pour l’ensemble de la zone littorale méditerranéenne qui a vu sa population croitre de manière exponentielle et aussi pour l’ensemble des Pays du Sud de la Méditerranée où, notamment, la dégradation des forêts est particulièrement alarmante.
C’est moins vrai pour certaines zones européennes où la déprise agricole est très forte, mais se posent alors d’autres types de problèmes, liés par exemple, à la disparition de milieux ouverts présentant une biodiversité remarquable. 
S’ajoutent à cela, dans tous les cas, l’impact croissant des plantes invasives, favorisées par les échanges intercontinentaux, et identifiés comme une des causes majeures de perte de biodiversité à l’échelle du globe.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Thuya de Berberie (Tetraclinis articulata), endémique du bassin méditerranéen

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Genévrier thurifère (Juniperus thurifera), dans les Atlas marocains où il est très menacé

 

[1] Une espèce endémique est une espèce qui n’existe que sur un territoire donné. Si elle disparaît de ce territoire, elle disparaît de la planète